Bricolage catamaran: réparer un trou dans une coque
posted in Voile, FXOne |Fin mai, nous avons eu le malheur d’avoir notre bateau vandalisé sur le parking du Centre Nautique de Mandelieu: des idiots ont pris un piquet de parasol chez le plagiste d’à côté et n’ont rien trouvé de mieux que de voir si ça rentrait bien dans une coque en sandwich mousse / fibre polyester telle que sur mon beau Hobie Cat FX One.
Passés les premiers moments d’agaçement et une engueulade mémorable avec le plagiste ("La Voile d’Azur" à Mandelieu, n’y allez pas, le patron est très "spécial" …), je me suis lancé dans une réparation.
Si ça vous arrive: pas de panique, votre bateau n’est pas fichu, ça se répare très bien.
Ce post décrit le matériel nécessaire et les différentes étapes pour rattraper un tel "poinçonnage". La technique est valable pour les oeuvres vives de tout type de bateau à coque polyester, de l’Optimist au Class America (bon eux c’est en carbone, mais la technique est la même …).
- Cutter
- Ciseaux à bois
- Paire de ciseaux
- Gants en latex
- Résine Epoxy + Catalyseur + Charges + taffetas fibre
- Des intercalaires en plastique pour protéger votre surface de travail de la résine
- Ruban adhésif (par ex. grey tape, ou mieux, il existe des adhésifs spéciaux pour travaux de peinture qui ne laissent pas de traces et sur lesquels la résine epoxy n’adhère pas)
- Papier de verre gros grain (80) et moyen grain (180)
- Papier de verre de carrossier à l’eau grains 240 à 800 (ou + si vous êtes courageux)
- Gelcoat polyester blanc ou laque polyuréthane bi-composant (pour la finition)
- Gant à lustrer (ou mieux: disque de lustrage à fixer sur ponçeuse excentrique)
- Acétone ou diluant peinture
- Polish pour gelcoat
- Chiffon
Etape 1: préparation de la zone à réparer
Commencer par vérifier si la "peau" interne de la coque ne s’est pas décollée de l’âme en mousse (On parle alors de délaminage. Si c’est le cas, alors la réparation sera beaucoup plus lourde et n’est pas l’objet du présent article). Fort heureusement, il ne s’agissait que d’un poiçonnage sans effets catastrophiques autour du point d’impact.
Avec le tranchant du ciseau à bois, tracer une entaille dans le gelcoat pour délimiter une zone autour du trou dans laquelle le gelcoat sera décapé. Ensuite enlever précautionneusement le gelcoat au ciseau à bois de manière à exposer le polyester de la coque.
Ebarber les restes de fibre de la peau intérieure au cutter. Elargir ensuite le trou (si ! si ! n’ayez pas peur… pas trop quand même). Réaliser un biseau ouvert vers l’extérieur.
Etape 2: stratification fibre polyester / résine epoxy
Découper des morceaux de tissu de fibre destinés à être "empilés" dans le trou. Ils doivent déborder un peu sur les rebords. Prévoir au moins 4 ou 5 couches de fibre.
Petit conseils préalables avant de se lancer dans le collage à la résine epoxy:
- Ne pas faire de résine si la température est inférieure à 18 degrés ou si le temps est humide ou pluvieux. Dans ces conditions la résine ne durcira pas et vous vous retrouverez à devoir gratter une pâte chewingum-esque et tout recommencer (c’est du vécu). Donc si il est plus de 16h, attendez le lendemain.
- Protéger le pourtour de la surface de travail avec des intercalaires en plastique (la résine ne colle pas dessus) scotchés au ruban adhésif.
- Mettre les gants de latex pour protéger vos mains. C’est une vraie saloperie.
- Préparer la résine epoxy selon les proportions préconisées (ça dépend de la marque, par exemple pour West System c’est 1 volume de catalyseur pour 5 de résine. mais chez d’autres c’est 1 pour deux ou 1 pour 4).
- Doser les composants avec un petit récipient gradué ou des seringues (une pour la résine et une pour le catalyseur). Attention, pour cette réparation vous n’aurez pas besoin de beaucoup de résine. On a toujours tendance à en faire trop.
(a partir de là, plus de photos: j’avais les doigts pleins de résine)
Une fois la résine prête, encoller les parois biseautées du trou. Placer le plus grand morceau de fibre au fond. (Note: pour les réparations de plus grande surface, il est conseillé de "refaire" la peau intérieure en encollant plusieurs couches de fibre sur un intercalaire et en plaquant le tout à l’intérieur du flotteur avec du ruban adhésif. Dans mon cas je ne l’ai pas fait pour 2 raisons: l’intérieur de la coque était inaccessible, le trou était relativement petit).
Imprégner la surface extérieure du morceau de fibre que vous venez de poser, puis répéter l’opération avec les autres morceaux jusqu’à ce que les couches de fibre atteignent la surface de la coque. Ne pas hésiter à bien charger en résine.
En vue transversale, ça doit donner à peu près ça:
Recouvrir d’un intercalaire en plastique, scotché sur la coque de manière à épouser la forme du flotteur. Bien essuyer les bavures de résine avec un chiffon imprégné d’acétone. C’est toujours ça que vous n’aurez pas à poncer après.
Laissez la résine sécher au moins 48h (ou plus si la température est relativement fraîche et l’humidité élevée).
Après séchage, poncer à gros grains les irrégularités et les fibres qui dépassent.
Eventuellement, refaire une couche de finition avec de la résine epoxy chargée aux billes de polyester si des trous restent (causés par des bulles d’air piégées dans la résine).
Etape 3: Finitions
Pour la finition, vous avez le choix entre 2 méthodes: gelcoat ou laque polyester.
La méthode gelcoat vous donnera la finition la plus proche de l’état original mais demandera beaucoup plus d’efforts et de patience.
La méthode laque a ma faveur, elle requiert beaucoup moins d’effort (pas de lustrage) et donne un résultat correct.
Pour la méthode gelcoat: Poncer à grains moyen (180) de manière à ce que la première couche de gelcoat attache. Préparer du gelcoat assez épais selon les proportions de durcisseur préconisées par le fabricant. Appliquer au pinceau (ou à la taloche pour les grandes surfaces). Laisser sécher (ça prend plusieurs jours). Poncer au papier à l’eau grain 240. Répéter l’opération autant de fois que vous aurez le courage avec du gelcoat un peu moins épais et des grains de ponçage de plus en plus fins à chaque fois (les pros vont jusqu’à 1200 !). Quand l’état de surface est impeccable (vérifiez en lumière rasante, par ex. au soleil couchant ou la nuit avec une lampe), appliquer du polish et lustrer de manière à redonner son brillant originel au gelcoat de la coque (à la main c’est TRES pénible, préférer un disque de lustrage fixé à une ponçeuse circulaire excentrique).
Pour la méthode laque: Contrairement au gelcoat, il faut partir d’un état de surface impeccable AVANT de passer la laque. Donc n’hésitez pas à repasser par la case epoxy pour boucher tous les petits trous. Poncer à grains moyens (180) puis au papier à l’eau 240 pour que la première couche de laque attache sur l’epoxy. Appliquer la laque au pinceau. Laisser sécher au moins 24h et poncer au grain 240 entre chaque couche. En général 3 couches suffisent pour un bon résultat. Une erreur commune est de poncer la laque avec des grains très fins. Dans ce cas, la couche suivante de laque n’attache plus et pèle à l’usage (c’est du vécu, je devrais apporter une correction à mon article sur le reshaping de dérives). La laque polyuréthane bouche les micro-rayures de ponçage en séchant et acquiert un état de surface très lisse. Pas besoin de lustrage. Attention aux coulures tout de même (elle peuvent se rattraper par ponçage).